
Mon petit village
Quand je suis retourné dans mon petit village,
Blotti au creux des bois, je n'ai rien reconnu.
Notre bon vieux clocher datant du Moyen-Age,
L'église, la fontaine, tout avait disparu.
Les vieux n'étaient plus là, assis devant leur porte,
Dans la grande rue d'ombre qui montait au château.
Ils prévoyaient le temps, disant d'une voie forte:
Demain.. il va pleuvoir! ou.. l'été sera chaud!
La vieille tante Olga n'était plus là non plus,
Elle qui nous comptait de si belles histoires,
Et qui, les soirs d'été, quand il avait trop plu,
Nous offrait du tilleul, que nous adorions boire.
Les rues se sont parées de nouvelles demeures,
Au crépis rutilants et aux murs bien jointés,
La grange, où nous jouions, l'été, de longues heures,
Est devenue depuis un restaurant coquet.
La fontaine a reçu de nouvelles sculptures,
Et l'eau vive bouillonne sur le marbre ouvragé,
Notre nouvelle église a pourtant fière allure,
Mais.. on y prie moins bien qu'au bon vieux temps passé.
De nouvelles villas, le long de la rivière,
Reflètent leurs jardins dans le miroir des eaux,
Et le petit lavoir, tout en bas, sous les lierres,
Est devenu guinguette, et son petit bistrot.
Mes pas, nonchalamment, m'emmènent au cimetière,
Et là, à ma surprise, tout était comme avant.
Le caveau de famille, la photo des parents
Sur le stèle en granit, venant du Finistère,
Le vase vernissé, garni de fleurs sauvages
Que nous cueillions, enfants, le jour de la Toussaint,
Ou encore au printemps, pendant le patronage,
Après avoir joué dans le champ du voisin.
Pour ceux qui me sont chers ayant prié longtemps,
Et me remémorant les joies de mon enfance,
Je me suis rappelé ce proverbe d'antan:
Garde des souvenirs l'éternelle Jouvence.
Bien sûr, mais pourquoi donc n'y ai-je pas songé?
Chaque maison a dû conservé son histoire..
Dans tous ces vieux objets si chers à nos mémoires.
Et là, j'étais certain de pouvoir retrouver..
Le viel album froissé, la grande table en bois...
La vieille cheminée où les braises rougeoient,
Les casseroles en cuivre, l'horloge centenaire,
Les chaises ciselées, la belle panetière,
Et le grand lit en cuivre où dormaient les aïeux,
L'armoire de famille, les gros draps de lin bleu,
Le sabre du grand-père, qui était... Commandant,
Et l'éventail nacré.. qui venait d'Orient..
Bien d'autres choses encore qui font nos souvenirs,
Et qui, bien au-delà de leur air désuet,
Au fond de notre coeur, nous parlent du passé.
Ah! mon petit village.. j'aimerais tant revenir.